Sur l’attitude des révolutionnaires à l’égard de la police

Lettre ouverte à la rédaction de Révolution (Envoyé le 29 juillet 2023)

(Comme nous ne disposons que d’une capacité linguistique très limitée en français, nous avons dû recourir à une traduction automatique de ce texte – nous avons joint l’original en anglais).


Chers camarades,

Nous prenons connaissance de votre récent article Les mésaventures de l’« apaisement » qui critique correctement les dirigeants de la CGT pour avoir proposé de « refonder notre police républicaine ». L’article se termine par une évaluation cinglante du rôle de la police et de la nécessité de briser cet élément central de l’appareil répressif de l’Etat bourgeois :

« Les dirigeants de la CGT et de la France insoumise ont raison d’exiger l’abrogation de la loi Cazeneuve de 2017 sur le « permis de tuer ». Mais il ne faut pas s’imaginer que l’abrogation de cette loi mettrait un terme aux meurtres policiers. Du fait de son rôle objectif sous le capitalisme, la police est fatalement un nid de racistes et de réactionnaires endurcis. De manière générale, la police bourgeoise ne pourra pas être « refondée » dans un sens progressiste. La police bourgeoise sera brisée, pulvérisée, en même temps que la bourgeoisie sera chassée du pouvoir, que ses moyens de production seront expropriés et que la société sera refondée sur des bases socialistes. Toute autre perspective est un bavardage réformiste qui sème de dangereuses illusions dans notre classe. » (accentuation ajoutée)

Bien que nous soyons d’accord avec cette conclusion, nous sommes quelque peu déconcertés par le fait qu’elle diverge de l’approche que vous avez adoptée il y a seulement deux ans dans votre article sur les “marches de la liberté” après le passage à tabac de Michel Zecler le 21 novembre 2020 (« Réformer » la police bourgeoise ?) Dans ce cas, vous avanciez une évaluation très différente de la police :

« La lutte pour des réformes progressistes – et pour défendre nos conquêtes passées – doit être fermement liée à la lutte pour en finir avec le système capitaliste. Au cours des luttes titanesques qui s’annoncent, le mouvement ouvrier ne devra pas se faire d’illusion sur le rôle et la nature de la police. Cependant, il devra aussi exploiter chaque fissure qui s’ouvre dans les rangs de la police ; il devra tout faire pour élargir ces fissures et semer la zizanie dans l’appareil d’Etat bourgeois. En particulier, il devra soutenir et alimenter les revendications progressistes qui émergent des rangs de la police, car celle-ci n’est pas seulement constituée d’irrécupérables réactionnaires, loin de là, et sa « base » souffre de conditions de travail dégradées – pendant que les chefs touchent de gros salaires. Tout en formant les organes de son futur pouvoir, la classe ouvrière devra s’efforcer de diviser l’Etat bourgeois suivant une ligne de classe. Ce sera beaucoup plus utile et efficace qu’un millier de sermons sur la nécessité de « réformer » – ou de « refonder » – la police bourgeoise. » (accentuation ajoutée)

De deux choses l’une : soit, en moins de trois ans, la nature de la police française a fondamentalement changé, soit vous avez effectivement inversé votre position sur cette question, sans le reconnaître.

Alors que vous décriviez des fissures et des lézardes il y a trois ans, vous considérez aujourd’hui tous les flics, y compris ceux qui présentent des demandes « progressistes » pour améliorer leurs « conditions de travail », comme un nid de racistes et de réactionnaires endurcis. Considérez-vous aujourd’hui votre attitude de 2020 à l’égard de la police comme un « bavardage réformiste qui sème de dangereuses illusions dans notre classe » ?

Une telle évolution serait accueillie favorablement par tous ceux qui partagent l’avis de Trotsky :

« Le fait que les policiers ont été choisis pour une part importante parmi les ouvriers sociaux-démocrates ne veut rien dire du tout. Ici encore c’est l’existence qui détermine la conscience. L’ouvrier, devenu policier au service de l’État capitaliste, est un policier bourgeois et non un ouvrier. » [Extrait du texte original traduit].
La révolution allemande et la Bureaucratie Stalinienne – Problèmes vitaux du prolétariat allemand, janvier 1932

Nous nous demandons si le changement radical de votre position n’est pas motivé par une impulsion opportuniste d’adaptation à ce qui est actuellement populaire – aujourd’hui, la vision sociale-démocrate de la police en tant que travailleur que vous défendiez il y a quelques années vous discréditerait aux yeux de ceux qui sont scandalisés par la brutalité policière manifeste qui a suivi le meurtre de Nahel Merzouk le mois dernier.

En 2021, nous avons soulevé essentiellement la même question dans une polémique avec le groupe britannique Socialist Alternative qui, comme vous, s’inscrit dans la tradition politique de la Militant Tendency. Ils n’ont pas répondu, mais peut-être ne serez-vous pas aussi timide.

Étant donné que rien de fondamental n’a changé, nous sommes intéressés de savoir si votre dernier article représente une pièce d’affichage jetable, unique et orthodoxe destinée à fournir une couverture de gauche à la politique continue de Révolution de préconiser un « bavardage réformiste » sans issue ou s’il signale un mouvement dans la direction d’une rupture révolutionnaire avec le faux-trotskysme ?

Salutations révolutionnaires,
Alan Davis pour la tendance bolchevique

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Open letter to the Editors of Révolution (Sent on 29 July 2023)

Comrades,

We note your recent article Les mésaventures de l’« apaisement » correctly critiques the leaders of the CGT for proposing « refonder notre police républicaine ». The article ends with a scathing assessment of the role of the police and the need to smash this core element of the bourgeois state’s repressive apparatus:

« Les dirigeants de la CGT et de la France insoumise ont raison d’exiger l’abrogation de la loi Cazeneuve de 2017 sur le « permis de tuer ». Mais il ne faut pas s’imaginer que l’abrogation de cette loi mettrait un terme aux meurtres policiers. Du fait de son rôle objectif sous le capitalisme, la police est fatalement un nid de racistes et de réactionnaires endurcis. De manière générale, la police bourgeoise ne pourra pas être « refondée » dans un sens progressiste. La police bourgeoise sera brisée, pulvérisée, en même temps que la bourgeoisie sera chassée du pouvoir, que ses moyens de production seront expropriés et que la société sera refondée sur des bases socialistes. Toute autre perspective est un bavardage réformiste qui sème de dangereuses illusions dans notre classe. » (accentuation ajoutée)

[Machine translation to English]

“The leaders of the CGT and France insoumise are right to demand the repeal of the 2017 Cazeneuve “license to kill” law. But we shouldn’t imagine that repealing this law would put an end to police killings. Because of its objective role under capitalism, the police is inevitably a nest of hardened racists and reactionaries. Generally speaking, the bourgeois police cannot be “refounded” in a progressive sense. The bourgeois police will be shattered, pulverized, at the same time as the bourgeoisie is ousted from power, its means of production expropriated and society rebuilt on socialist foundations. Any other perspective is reformist chatter that sows dangerous illusions in our class.” (emphasis added)

While we agree with this conclusion we are left somewhat bemused by how it diverges from the approach you took only a couple of years ago in your article about the “freedom marches” following the beating of Michel Zecler on 21 November 2020 (« Réformer » la police bourgeoise ?) In that case you advanced a very different assessment of the police:

« La lutte pour des réformes progressistes – et pour défendre nos conquêtes passées – doit être fermement liée à la lutte pour en finir avec le système capitaliste. Au cours des luttes titanesques qui s’annoncent, le mouvement ouvrier ne devra pas se faire d’illusion sur le rôle et la nature de la police. Cependant, il devra aussi exploiter chaque fissure qui s’ouvre dans les rangs de la police ; il devra tout faire pour élargir ces fissures et semer la zizanie dans l’appareil d’Etat bourgeois. En particulier, il devra soutenir et alimenter les revendications progressistes qui émergent des rangs de la police, car celle-ci n’est pas seulement constituée d’irrécupérables réactionnaires, loin de là, et sa « base » souffre de conditions de travail dégradées – pendant que les chefs touchent de gros salaires. Tout en formant les organes de son futur pouvoir, la classe ouvrière devra s’efforcer de diviser l’Etat bourgeois suivant une ligne de classe. Ce sera beaucoup plus utile et efficace qu’un millier de sermons sur la nécessité de « réformer » – ou de « refonder » – la police bourgeoise. » (accentuation ajoutée)

[Machine translation to English]

“The struggle for progressive reforms – and to defend our past gains – must be firmly linked to the struggle to do away with the capitalist system. In the titanic struggles ahead, the labor movement must be under no illusions about the role and nature of the police. However, it will also have to exploit every crack that opens up in the ranks of the police; it will have to do everything in its power to widen these cracks and wreak havoc on the bourgeois state apparatus. In particular, he will have to support and nurture the progressive demands that emerge from the ranks of the police, for the latter is not only made up of irredeemable reactionaries, far from it, and its “rank and file” suffers from worsening working conditions – while the chiefs earn fat salaries. While forming the organs of its future power, the working class must strive to divide the bourgeois state along class lines. This will be far more useful and effective than a thousand sermons on the need to “reform” – or “refound” – the bourgeois police.” (emphasis added)

This would seem to imply one of two things: either, in less than 3 years the nature of the French police has changed fundamentally, or you have effectively reversed your position on this question, without acknowledging as much.

Where you described fissures and cracks three years ago, today you view all cops, including those putting forward “progressive” demands to improve their “working conditions” for themselves, as a nest of hardened racists and reactionaries. Do you now regard your 2020 attitude towards the police as “reformist chatter that sows dangerous illusions in our class”?

Such a development would be welcomed by all those who agree with Trotsky that:

« Le fait que les policiers ont été choisis pour une part importante parmi les ouvriers sociaux-démocrates ne veut rien dire du tout. Ici encore c’est l’existence qui détermine la conscience. L’ouvrier, devenu policier au service de l’État capitaliste, est un policier bourgeois et non un ouvrier. » [From original translated text].
La révolution allemande et la Bureaucratie Stalinienne – Problèmes vitaux du prolétariat allemand, January 1932

English version:

“The fact that the police was originally recruited in large numbers from among Social Democratic workers is absolutely meaningless. Consciousness is determined by environment even in this instance. The worker who becomes a policeman in the service of the capitalist state, is a bourgeois cop, not a worker.”
What Next? Vital Questions for the German Proletariat

We wonder if perhaps the dramatic shift in your position is that it is motivated by an opportunist impulse to adapt to what is currently popular–today the social democratic view of the police as workers which you advanced a few years ago would discredit you in the eyes of those outraged by the overt police brutality following the murder of Nahel Merzouk last month.

In 2021 we raised essentially the same issue in a polemic with the British group Socialist Alternative which, like you, stands in the political tradition of the Militant Tendency. They did not reply, but perhaps you will not be so shy.

Given that nothing fundamental has changed, we are interested in whether your latest article represents a throwaway, one-off, orthodox display piece designed to provide left-cover for Révolution’s continuing policy of advocating dead-end “reformist chatter” [“un bavardage réformiste”] or if it signals some movement in the direction of a revolutionary break with fake-Trotskyism?

Revolutionary greetings,
Alan Davis for the Bolshevik Tendency